Droit Local

Anciens territoires annexés, l’Alsace et la Moselle ont pu conserver certains avantages du droit concordataire napoléonien et du code civil allemand, plus avancé en matière sociale après le Traité de Versailles que le code civil français. Il propose par exemple une caisse d’assurance maladie mieux gérée que dans le reste de la France, octroie deux jours fériés supplémentaires, interdit le travail dominical, n’impose pas de délai de carence pour les congés maladie et offre le maintien de la rémunération pour les salariés du privé sans délai et sans condition d’ancienneté lorsque la cause de l’absence n’est pas due à leur fait et empêche réellement l’exécution du contrat de travail.

Le commerce est encadré par certaines dispositions du Code Civil Local en Moselle (Crédits photo : Groupe BLE Lorraine)

Le régime de sécurité sociale alsacien-mosellan, qui bénéficie à plus de 2,5 millions de personnes, est équilibré. Il y a alternance entre périodes déficitaires et excédentaires. Il est payé uniquement par une cotisation sociale supplémentaire des salariés alsaciens et mosellans. En 2011, les recettes ont dépassé les dépenses de plus de 5,5 millions d’euros, à quoi se sont ajoutés des produits financiers d’environ 18 millions d’euros, soit au total 23,5 millions d’euros, alors que le trou de la sécurité sociale française est abyssal. Grâce à la bonne santé du régime local de sécurité sociale, les cotisations 2012 ont été abaissées. L’une des raisons de ce constat est culturelle. La gestion de proximité, disciplinée et autonome, exercée par les seuls syndicats de salariés, est plus efficace. Ici, les assurés sociaux, c’est-à-dire  les salariés et les retraités, cotisent davantage pour financer ce dispositif. Ils s’acquittent en effet d’une cotisation supplémentaire qui leur ouvre le droit à une complémentaire santé obligatoire issue de la Reichsversicherungsordnung de 1911. Celle-ci porte par exemple à 90 % le taux de remboursement des honoraires médicaux, contre un taux de 70 % dans le reste de la France, et prend intégralement en charge le forfait journalier hospitalier qui n’est pas pris en compte ailleurs.

Le Droit Local constituait en outre un gage de solidarité envers les personnes sans ressources. En effet, selon la loi du 30 mai 1908, les communes étaient obligées de secourir les personnes sans ressource habitant sur leur territoire. Chaque commune fixait le plafond de ressources conditionnant l’octroi de l’aide et choisissait la forme de l’aide allouée, en espèces ou en nature (logement, nourriture, etc.). La loi de « modernisation sociale » du 1er janvier 2010 a malheureusement abrogé cette disposition et a intégré des mesures spécifiques dans le nouveau code de l’action sociale et des familles.

Il est assez déroutant et humiliant que Paris considère systématiquement ces dispositions comme « arriérées ». S’agit-il d’une méconnaissance de l’Histoire mosellane, de jalousie ou de l’éternelle vindicte qui veut que lorsqu’un groupe de personnes possède un droit plus avancé, on le tire vers le bas plutôt que d’essayer d’aligner tout le monde vers le haut ? Ou est-ce encore une arrogance parisienne qui veut que les lois françaises soient meilleures que toutes, universelles et applicables partout, des anciennes colonies jusqu’à la Moselle ? A noter enfin que ce sont souvent des voix dites « progressistes » ou sociales qui voudraient tirer l’Alsace-Moselle vers le bas.

Le Droit Local fait partie de notre identité et il est impératif de ne jamais s’en séparer.

C’est pourquoi le Groupe BLE Lorraine milite pour la connaissance et la défense du Droit Local. Il entend par ailleurs, en vertu des avantages qu’il procure aux citoyens et à la société, l’étendre à l’ensemble des territoires lorrains.

Pour en savoir plus sur le Droit Local en Moselle :

– Droit Local en Moselle

– Particularités du Droit Local

– Exemples de dispositions du Droit Local en Moselle

– Sécurité sociale en Moselle

– Droit Local et repos dominical (mis à jour)

– Droit Local et repos dominical

– Droit Local et Constitution

– Régime forestier

– Gardes champêtres et police rurale

– Assurance vieillesse des ministres du culte

– Confessionnalité des cimetières

– Moselle voie fluviale internationale

– Statut scolaire en Moselle

– Vendredi Saint en Moselle

– Affaire du Christ en Croix au Palais de Justice de Metz

– Association et Droit Local

– Délit de blasphème

– Droit au blasphème en Moselle

– Droit Local du Travail

– Droit Local du Travail et durée du préavis

– Droit Local maintien salaire coronavirus

– Ouverture dominicale des commerces

– Ouverture commerces dimanches avant Noël

– Droit Local communal

– Laïcité et Droit Local

– Réglementation du 26 décembre en Moselle

– Réglementation de la sonnerie des cloches

– Ouverture des commerces le dimanche des soldes hiver

– Régime culte Droit Local

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26 commentaires

  1. L’ouverture des commerces sera limitée en Moselle le Vendredi Saint 10 avril 2020. En effet, l’arrêté préfectoral du 7 avril autorise uniquement en cette période de lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19 l’ouverture des commerces suivants : les stations-services et les services de dépannage d’urgence, les débits de tabacs, la vente de journaux, les boulangeries, les pâtisseries et les glaciers, les loueurs de véhicules et de cycles, les sandwicheries et les commerces de restauration à emporter, les commerces d’alimentation générale d’une superficie égale ou inférieure à 200 mètres carrés jusqu’à 13 heures et les marchés de denrées alimentaires jusqu’à 13 heures également.

    Bernard ZAHRA, Professeur de Droit en classe préparatoire à l’expertise comptable à Metz, pour le Groupe BLE Lorraine.

  2. En 2017, un accord sur les contreparties au travail le dimanche et les jours fériés exceptionnellement travaillés a enfin été signé en Moselle par différentes organisations syndicales et patronales. Les salariés mosellans occasionnels du dimanche ont donc depuis un statut. Les compensations qu’ils ont obtenues sont supérieures à ce qui se pratique ailleurs.

    Ce premier accord en Moselle a été signé par quatre syndicats (CFDT, CFE-CGC, CFTC et FO) et deux patronats (CPME et U2P). Il concerne les salariés des commerces et des services associés, comme par exemple les agents de sécurité et de propreté, appelés à travailler de manière exceptionnelle certains dimanches ou jours fériés. L’accord prévoit qu’ils ne peuvent désormais le faire que sur la base du volontariat. Par ailleurs, l’employeur doit leur faire parvenir une proposition au moins trente jours avant la date. Il faut savoir que depuis la modification des statuts départementaux en 2015, les commerces peuvent ouvrir le premier dimanche des soldes d’hiver et d’été, quatre dimanches au choix avant Noël, ainsi que certains dimanches et jours fériés selon des circonstances locales (fêtes, manifestations culturelles, etc.). Cependant, cet accord ne concerne pas les salariés dont l’activité est autorisée par dérogation à ouvrir tous les dimanches.

    A noter enfin qu’en termes d’avantages, les salariés bénéficient de salaires doublés en cas de dimanches et de jours fériés travaillés et d’un repos compensateur équivalent. L’employeur doit également prendre en charge les frais de déplacement ou de stationnement. Un lissage des chèques déjeuners ou une prime de repas de 6,40 euros bruts sont aussi proposés.

  3. En Droit Local, toutes les suspensions du contrat de travail n’ouvrent pas forcément droit à maintien de la rémunération : il faut se demander si les empêchements liés à la personne sont fondés ou non sur des raisons sérieuses. Ainsi, en l’absence d’un certificat médical d’arrêt de travail, une légère indisposition n’empêchant pas l’exécution de la prestation de travail n’ouvre donc pas droit au maintien de salaire.

  4. En Meurthe-et-Moselle, les commerces de détail peuvent ouvrir douze dimanches sur toute l’année, après autorisation municipale. A Nancy, les commerces ouvriront le dimanche 7 janvier 2018, toute la journée. De par la Loi Macron, les salariés ont droit à une rémunération doublée, ainsi qu’à un repos compensateur équivalent.

    A Metz, le statut départemental de la Moselle du 18 mai 2015 autorise l’ouverture des commerces le premier dimanche des soldes d’hiver mais seulement dans la limite de cinq heures. Le dimanche 7 janvier 2018, les salariés du commerce travailleront sur la base du volontariat mais le Droit Local ne prévoit ni majoration de salaire, ni repos compensateur particulier sauf dispositions contractuelles ou conventionnelles. Pour la première fois, l’accord collectif territorial du 27 mars 2017 s’appliquera avec ses contreparties intéressantes : rémunération doublée, repos compensateur, prise en charge des frais de déplacement, de stationnement et de restauration. Mais cet accord collectif n’a pas été étendu par le ministre du travail à toutes les entreprises suite à l’opposition du MEDEF (Mouvement des Entreprises de France) : seuls bénéficient de cet accord collectif, les salariés des entreprises signataires.

    Au final, comme pour les dimanches de l’Avent, il existe une disparité en défaveur des salariés mosellans du commerce puisqu’ils ne bénéficient pas d’un régime de compensation obligatoire du travail le dimanche des soldes d’hiver.

    Bernard ZAHRA, Professeur de Droit en classe préparatoire à l’expertise comptable à Metz, pour le Groupe BLE Lorraine.

  5. En Moselle, le Droit Local s’applique aussi et à Metz, il a été décidé d’ouvrir les commerces les quatre dimanches avant Noël de 9 h à 19 h. Les salariés travaillent sur la base du volontariat et bénéficient depuis l’accord collectif du 27 mars 2017 de contreparties intéressantes : rémunération doublée, repos compensateur, prise en charge des frais de déplacement, de stationnement et de restauration. Mais cet accord collectif n’a pas été étendu par le ministre français du travail à toutes les entreprises suite à l’opposition du MEDEF (Mouvement des Entreprises de France). Seuls bénéficient de cet accord collectif, les salariés des entreprises signataires.

    Il existe donc une nette disparité en défaveur des salariés mosellans du commerce puisqu’ils sont les seuls en France à ne pas bénéficier automatiquement d’un régime de compensation obligatoire du travail dominical avant Noël.

    Bernard ZAHRA, Professeur de Droit en classe préparatoire à l’expertise comptable à Metz, pour le Groupe BLE Lorraine.

  6. L’évolution du cadastre d’Alsace-Moselle constitue un exemple réussi d’une modernisation du Droit Local. Ce dernier avait pourtant perdu de sa force probante lorsque dans son arrêt du 17 juillet 1968 la Cour de Cassation l’avait amputé. La situation a été corrigée par la loi du 6 mars 2017 qui a modifié la loi locale du 31 mars 1884 sur un point technique, à savoir la prescription acquisitive. Désormais, on peut à nouveau être juridiquement propriétaire d’un bien immeuble après trente ans si on s’en est occupé comme si on l’était et même si ce bien sort du registre cadastral. Cette force probante retrouvée conforte donc la sécurité juridique des opérations portant sur les immeubles situés en Moselle.

    A noter que le cadastre d’Alsace-Moselle se lance dans un autre projet de modernisation, à savoir sa numérisation.

  7. Les dispositions de Droit Local sur le maintien du salaire sont plus favorables aux salariés d’Alsace-Moselle que celles découlant du droit général. Mais présenter ces dispositions comme ouvrant un droit automatique à maintien du salaire dès que le salarié est absent relève de l’ordre des idées reçues. Il existe des conditions précises d’application de ces textes et notamment de l’Article L.1226-23 du Code du Travail : l’absence du salarié doit être indépendante de sa volonté et la cause de l’absence doit être personnelle au salarié. L’Article L.1226-23 du Code du Travail ne peut pas s’appliquer aux salariés d’Auchan Sémécourt : les absences des salariés liées aux travaux de charpente dans le centre commercial sont des causes extérieures aux salariés.

    Bernard ZAHRA, Professeur de Droit en classe préparatoire à l’expertise comptable à Metz, pour le Groupe BLE Lorraine.

  8. Depuis 1990, le préfet a toujours interdit l’ouverture des commerces en Moselle. L’arrêté du 16 mars 2016 prévoit néanmoins dans ses articles 3 et 4 des dérogations d’ouverture pour les stations-services et services de dépannage d’urgence ; les débits de tabacs ; la vente de journaux ; la vente de fleurs naturelles ; les boulangeries ; les pâtissiers et les glaciers ; les brocanteurs, antiquaires et bouquinistes ; les commerces de souvenirs et de produits artisanaux locaux ; les commerces d’artisanat d’art et les galeries d’art ; les loueurs de véhicules et de cycles ; les commerces dans les gares ; les cybercafés ; les sandwicheries et les commerces de restauration à emporter ; les commerces d’alimentation générale d’une superficie inférieure ou égale à 200 mètres carrés jusqu’à 13 heures ; l’organisation de marchés de denrées alimentaires, fleurs et produits manufacturés jusqu’à 13 heures, ainsi que les salons de coiffure mais uniquement de 8 heures à 13 heures pour ces derniers.

  9. Les ministres des cultes reconnus (catholiques, luthériens, réformés et juifs) sont rémunérés par le ministère de l’intérieur et dépendent de son bureau central des cultes. Ce dernier est notamment chargé d’appliquer le régime concordataire en Moselle. Les ministres du culte sont rémunérés selon une grille indiciaire équivalente à celle des fonctionnaires de catégorie B, sauf pour les hauts responsables. Les ministres du culte paroissial, c’est-à-dire les curés, pasteurs et rabbins ont par ailleurs droit à un logement gratuit ou, à défaut, à une indemnisation. D’après le décret du 8 octobre 2007, les cinq indices les plus hauts sont dans l’ordre : l’archevêque (hors échelle), l’évêque coadjuteur, les présidents des Eglises protestantes, l’évêque auxiliaire et le grand rabbin.

  10. Dans le cadre du projet de loi « Egalité et Citoyenneté », les sénateurs ont dernièrement adopté à la majorité l’Article 38 bis qui abroge le délit de blasphème et harmonise les peines prévues par le Droit Pénal Local (Articles 166 et 167) en cas de troubles du culte sur celles prévues en droit français.

    Rappelons que l’Article 166 du Code Pénal Local prévoit « une peine d’emprisonnement de trois ans au plus » pour « celui qui aura causé un scandale en blasphémant publiquement contre Dieu par des propos outrageants ou aura publiquement outragé un des cultes chrétiens ou une communauté religieuse ». Le délit de blasphème, qui avait disparu pendant la révolution française, a été définitivement rayé du droit par la IIIème République. En Alsace-Moselle, le texte du Code pénal allemand du 15 mai 1871 a été maintenu après la Première Guerre mondiale. S’il en existe des traductions, l’arrêté du 29 août 2013, portant publication de la traduction de lois et règlements locaux, maintenus en vigueur par les lois du 1er juin 1924, dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, a volontairement oublié de traduire l’Article 166 du Code Pénal Local. L’Etat français pensait que, non-traduit, l’Article 166 serait implicitement abrogé car contraire aux principes fondamentaux du droit français. Mais cela ne marche pas comme ça. En effet, un préfet ne peut pas abroger un texte de loi. Les cultes d’Alsace-Moselle ont été consultés et ont donné leur accord devant l’Observatoire de la laïcité et la Commission du Droit Local d’Alsace-Moselle. Celle dernière a rendu un avis favorable pour abroger le délit de blasphème mais pas les autres délits contre la liberté religieuse qui existent en termes différents en droit général et en Droit Local. Le 1er juillet, l’assemblée nationale a abrogé l’Article 166 du Code Civil Local. Elle a changé l’Article 167 qui sanctionne les troubles à l’exercice d’un culte en alignant les peines prévues avec celle du droit général. Cela recréait néanmoins un écart avec la loi de 1905 qui ne reconnaît pas le blasphème, mais punit les pressions et violences contre la liberté religieuse (Article 31) et le délit d’atteinte à l’exercice d’un culte (Article 32). Le Sénat a donc proposé d’abroger complètement les deux articles du Code Pénal Local (166 et 167) et de les remplacer par les Articles 31 et 32 de la loi de 1905. C’est cette solution qui a été adoptée. Comme ce projet de loi suit une procédure accélérée, il n’y a qu’une seule lecture dans chaque assemblée avant la Commission mixte paritaire.

  11. Selon l’Institut du Droit Local, le délit de blasphème n’est plus appliqué en Alsace-Moselle. Mais il n’est pas abrogé pour autant. En théorie, il reste donc applicable. Seul le Conseil constitutionnel peut désormais prononcer cette abrogation.

    Selon les recherches de Bernard Zahra, contributeur du Groupe BLE Lorraine et expert en Droit Local, cet article n’a mené qu’à une seule condamnation, le 21 octobre 1952, par le Tribunal correctionnel de Metz. Elle ne concernait pas le blasphème mais un autre versant de l’article, à savoir celui d’avoir « dans une église, commis des actes injurieux et scandaleux. » Le prévenu avait en effet été condamné à 6 000 francs d’amende pour avoir sonné les cloches et donné un coup à un curé en le traitant de « jeune morveux » lors d’un baptême.

  12. Même si les dispositions de l’Article 166 du Code pénal allemand réprimant le délit de blasphème n’ont jamais été expressément abrogées par le législateur, cet article n’est aujourd’hui plus applicable en France. Si en France, ce délit avait été aboli en 1881, en Alsace-Moselle, il figurait encore dans l’arsenal répressif, puisqu’il avait été intégré au Droit Local en 1919. Bien qu’il n’ait jamais été appliqué depuis, ce texte précisait que « celui qui aura causé un scandale en blasphémant publiquement Dieu par des propos outrageants sera puni d’un emprisonnement de trois ans au plus ».

    En une phrase et en réponse à une question écrite du député communiste du Puy-de-Dôme André Chassaigne, le ministère de la justice vient donc de mettre fin à ce sujet à controverse, applicable uniquement en Alsace-Moselle.

    L’argumentation repose sur la traduction jamais publiée de l’Article 166. Dès lors, comme l’a décidé le Conseil constitutionnel, « l’absence de version officielle en langue française d’une loi est contraire à l’objectif d’accessibilité de la loi ». En outre, ajoute le ministère, « tombé en désuétude », le délit de blasphème doit « être regardé comme implicitement abrogé car contraire aux principes fondamentaux de notre droit ».

    La position des services judiciaires reprend une double préconisation. D’abord, celle des représentants des cultes reconnus, à savoir protestants, catholique et juif, en Alsace-Moselle, qui le 6 janvier 2015, la veille des attentats contre Charlie hebdo avaient préconisé l’abandon de ce délit devant l’Observatoire de la laïcité. Puis, celle de cet Observatoire qui dans un avis publié en mai 2015 avait préconisé de faire « évoluer » le Droit Local, en abrogeant le délit de blasphème.

  13. Ouverture des commerces les quatre dimanches avant Noël en Moselle

    La loi Macron dans son volet ouverture des commerces le dimanche ne s’applique pas en Alsace et en Moselle. Aujourd’hui, il y a une disparité dans le régime de la compensation du travail dominical entre, d’une part, les salariés hors les départements alsaciens-mosellans soumis à la loi Macron (salaire doublé et repos compensateur), les salariés d’Alsace bénéficiant de l’accord du 6 janvier 2014 (salaire doublé et repos compensateur) et enfin les salariés mosellans qui, ni soumis à la loi Macron ni à l’accord de 2014, travailleront sans majoration de salaire sauf dispositions conventionnelles ou contractuelles plus favorables faute d’accord entre organisations patronales et syndicales.

    Bernard ZAHRA, Professeur de Droit en classe préparatoire à l’expertise comptable à Metz, pour le Groupe BLE Lorraine.

  14. Le Conseil constitutionnel a dernièrement jugé légitime de maintenir la rémunération par l’Etat des pasteurs, prêtres et rabbins. Celui-ci avait été saisi pour une Question Prioritaire de Constitutionalité (QPC) par le Conseil d’Etat, qui avait été lui-même saisi par une association.

    De la décision des Sages dépendait le maintien ou la suppression d’un pilier capital du régime concordataire. Mais ceux-ci ont finalement tranché en faveur du Code Civil Local, en estimant que la Constitution de 1958 pouvait maintenir des dispositions particulières antérieures à son entrée en vigueur sans nuire au principe de la laïcité. La décision du Conseil constitutionnel a donc entériné une conception de la laïcité ouverte et qui facilite le bien-vivre ensemble.

    Rappelons que le Droit Local fait régulièrement l’objet d’attaques déplacées de la part d’associations obscures jalouses des prérogatives qu’offrent ses dispositions. Par exemple, une association baptisée « République sans Concordat » a dernièrement été créée dans le but explicite de combattre le régime local des religions.

  15. La préfecture a publié l’arrêté autorisant certaines catégories de commerces à déroger au régime local du repos dominical et des jours fériés. Les dérogations actuelles ont été reconduites. Elles concernent les pharmacies, les débits de tabac, la vente de journaux, la vente de fleurs naturelles, les boulangeries, les pâtisseries, les spectacles, les transports, les hôtels, les cafés et les restaurants. La liste a été complétée, afin de « répondre aux besoins de la population les dimanches et jours fériés et au développement touristique du département de la Moselle ». Si bien qu’on retrouve désormais les stations-service et les services de dépannage d’urgence, les brocanteurs, les antiquaires et les bouquinistes, les commerces de souvenirs et de produits artisanaux locaux, les commerces d’artisanat d’art et les galeries d’art, les loueurs de véhicules et de cycles, les commerces dans les gares, les cybercafés, les sandwicheries, ainsi que les commerces de restauration à emporter. L’organisation de marchés de denrées alimentaires, de fleurs et de produits manufacturés est également autorisée jusqu’à 13 h. Quant à l’autorisation d’ouvrir les commerces d’alimentation générale, mise en place en 2014 jusqu’à 120 mètres carrés, elle est désormais accordée jusqu’à 200 mètres carrés.

    L’ensemble des arrêtés préfectoraux précédant cet arrêté est abrogé. Ce bouleversement fait suite au jugement du Tribunal Administratif de Strasbourg qui avait déclaré illégal l’arrêté préfectoral de 1956 régissant la question des ouvertures exceptionnelles le dimanche. Il avait été pris par le préfet de l’époque, jugé plus d’un demi-siècle plus tard incompétent, la tâche relevant en effet du Conseil départemental. Celui-ci a statué le 18 mai dernier. Il a fait passer de 4 à 6 le nombre d’ouvertures exceptionnelles le dimanche en Moselle : les quatre avant Noël et le premier de chaque période de soldes (exception faite pour les concessionnaires automobiles).

  16. La seconde loi Ferry rendit en 1882 l’enseignement laïc en France. Elle ne s’applique cependant pas en Moselle qui faisait alors partie du Reich. Revenu depuis dans le giron français, le département lorrain reste donc toujours sous l’égide de la loi Falloux de 1850, qui prévoit que l’enseignement primaire comprend l’instruction religieuse. L’Article 10 A de l’ordonnance du 10 juillet 1873 du Chancelier d’Empire, modifiée par l’ordonnance du 16 novembre 1887 du Reichsstatthalter, selon lequel dans toutes les écoles, l’enseignement et l’éducation doivent tendre à développer la religion, continue également d’être appliqué. Cet enseignement religieux est assuré par des enseignants volontaires, par un ministre du culte ou le plus souvent par une personne qualifiée proposée par l’autorité religieuse et rémunérée par des indemnités horaires.

    Rappelons que si les pouvoirs publics ont l’obligation légale d’organiser cet enseignement, les élèves n’ont pas l’obligation de le suivre. Au nom de la liberté de conscience, les parents ont en effet la possibilité de les en dispenser. Par ailleurs, les élèves ne suivant pas cet enseignement doivent théoriquement bénéficier en remplacement d’une heure d’enseignement moral, ce qui est en pratique très rarement le cas.

  17. En Alsace-Moselle, il est interdit de travailler les dimanches et jours fériés dans les commerces, à l’exception de dérogations qui concernant historiquement les pharmacies, les débits de tabac et les journaux, les hôtels-cafés-restaurants, les spectacles, les transports et les pâtisseries. Trois arrêtés supplémentaires ont permis d’ajouter à la liste les fleuristes en 1956, les boulangeries en 1969 et la vente de souvenirs en 1992. Les épiceries ouvertes le dimanche le sont donc en toute illégalité, sauf en période estivale suite à un arrêté préfectoral.

    La décision d’autoriser les commerçants à ouvrir les quatre dimanches précédant Noël revient aux municipalités. À l’exception de la ville de Metz, où le référent est le préfet. Celui-ci a refusé le quatrième dimanche aux commerçants messins, comme il a refusé la demande d’ouverture du premier dimanche des soldes, le 5 janvier, alors que les commerces nancéiens seront ouverts ce jour-là. En 2013, les commerçants des villes de Creutzwald, Dieuze, Forbach, Freyming-Merlebach, Hettange-Grande, Mondelange, Montigny-lès-Metz, Sarreguemines, Semécourt et Saint-Avold ont eu droit à quatre dimanches, par arrêté municipal

  18. A l’occasion d’une décision déclarant contraire à la loi fondamentale l’obligation faite aux artisans de s’affilier à l’une des 128 corporations professionnelles existantes en Alsace et en Moselle, le Conseil constitutionnel avait remarqué en novembre dernier qu’aucun des textes du droit allemand maintenus dans ces territoires par la loi du 1er juin 1924 n’avait de valeur au sein de la république française, faute d’avoir été traduit officiellement en français. Ils n’étaient donc pas applicables puisqu’inconstitutionnels, même si certains d’entre eux avaient été traduits et publiés au Bulletin Officiel d’Alsace-Moselle en 1925. En effet, malgré son titre, ce bulletin n’avait aucun statut officiel. Le gouvernement français a par ailleurs découvert que la plupart des textes adoptés par le Reich allemand entre 1871 et 1918 et encore appliqués en Alsace-Moselle ne bénéficiaient que de traductions officieuses et que les tribunaux se référaient à des textes en allemand, quand la constitution prévoit expressément que « la langue de la république est le français ». Or le corpus concerné contient des dispositions aussi importantes que le Code civil local, le règlement du cadastre et l’application du Concordat. C’est la raison pour laquelle un décret publié au Journal Officiel du 15 mai énumère 46 lois, arrêtés, ordonnances et autres règlements datant de l’Annexion. Ces derniers disposent désormais d’une traduction officielle en français qui les rend constitutionnels.

  19. Les oubliés du Régime Local

    Certaines personnes, qui ont quitté le Régime Local, par exemple parce qu’elles ont déménagé, ne savent pas toujours qu’elles peuvent en faire la demande de rattachement à leur retraite.

    Cela dit, tout le monde ne bénéfice pas du Régime Local pour sa retraite. Les salariés ayant travaillé en Moselle ou pour une entreprise dont le siège social est en Moselle pendant cinq années consécutives ou non au cours des quinze dernières années précédant la retraite peuvent y prétendre, tout comme les personnes affiliées au Régime Local durant 60 trimestres au cours de toute leur carrière. Cela vaut aussi bien pour les salariés du privé, les contractuels des trois fonctions publiques, les chômeurs ou préretraités que pour les titulaires de pension d’invalidité. Par conséquent, même une personne qui ne vit plus en Moselle peut encore bénéficier du Régime Local si elle y a été affiliée à un moment donné. Par contre, les fonctionnaires, les travailleurs indépendants, les exploitants agricoles, les salariés des régimes spéciaux, les bénéficiaires du RSA (Revenu de Solidarité Active) ou de l’allocation adulte handicapé ne peuvent malheureusement pas bénéficier du Régime Local.

    Rappelons que le Régime Local a des avantages non négligeables. Le forfait journalier et les frais d’hospitalisation sont par exemple gratuits. La pharmacie est remboursée à 90 %. La mutuelle est divisée par deux. Enfin, les retraités qui ne sont pas imposables, qui sont exonérés de CSG (Contribution Sociale Généralisée) et de CRDS (Contribution pour le Remboursement de la Dette Sociale), et dont les revenus n’atteignent pas le seuil de 10 024 euros, n’ont plus à payer les 1,5 % de cotisations sociales.

  20. La loi de 1905 ne s’applique pas à l’Alsace-Moselle, qui est soumise à un statut des cultes spécifique issu de la période napoléonienne, le régime concordataire de 1801. C’est une convention internationale qui lie la France et le Saint-Siège et ne régit donc que le culte catholique. A cela s’ajoutent les textes qui concernent les protestants en 1802, puis le culte israélite en 1844. Tout cela fait que les curés, pasteurs et rabbins sont en Alsace-Moselle salariés de l’Etat français et qu’un système permet aux communes d’intervenir dans le financement de l’entretien d’édifices cultuels.

  21. Dans la Moselle jadis annexée à l’Allemagne subsiste l’article de la loi Falloux de 1850, selon lequel l’enseignement religieux, catholique, luthérien, calviniste ou israélite est obligatoire. Le Concordat napoléonien de 1801, modifié en 1992, ne reconnaît pas le culte musulman, inexistant à l’époque. Les ministres des cultes, prêtres, pasteurs et rabbins, sont rémunérés par l’Etat français. Les collectivités locales participent également au financement des paroisses.

    Le Droit Local du travail est par ailleurs souvent avantageux. Il n’impose aucun délai de carence pour les congés de maladie, interdit le travail dominical, sauf dérogations, octroie deux jours fériés supplémentaires, à savoir le Vendredi Saint et la Saint-Etienne (26 décembre) et rassemble employeurs et salariés au sein de corporations obligatoires pour les artisans.

    A noter également que d’autres dispositions régissent les associations, qui sont dotées de capacités juridiques supplémentaires et qui sont autorisées à partager des bénéfices, le droit du commerce ou encore le droit de chasse.

    Autant de mesures qui restent incomprises des Français de l’intérieur.

  22. Singularité du Droit Local alsacien-mosellan, il existe toujours une procédure judiciaire de faillite personnelle pour les personnes physiques, en vertu d’une loi allemande du 10 février 1877, qui offre ainsi une meilleure protection sociale. Ce régime historique coexiste avec la procédure de rétablissement personnel relevant, elle, de la Banque de France.

  23. Si le délit de blasphème est proscrit en France depuis 1791, il est néanmoins toujours en vigueur en Alsace-Moselle. En Droit Local, il correspond à des propos outrageant visant un des cultes chrétiens ou une communauté religieuse reconnue, ainsi qu’à des actes injurieux et scandaleux commis dans un lieu consacré. Il est passible de trois ans d’emprisonnement. Certes, certains voudraient tout moderniser, mais cette réglementation issue du Droit Local vise à protéger la liberté religieuse des croyants, quelle que soit leur religion. En France, la loi de 1881 sur la liberté de la presse sanctionne le même type d’infraction, puisque tout propos ou écrit qui porterait atteinte à un groupe pour ses affinités politiques, syndicales, religieuses ou autres est réprimandé. Ce qui est extraordinaire avec l’argent public en France, c’est qu’on peut tout financer, la politique ou encore le sport, tout, sauf la pratique religieuse des citoyens français.

    Le Droit Local est un instrument de paix sociale (voir : https://blefondation.fr/droit-local/). Il permet d’organiser le dialogue interreligieux, ce qui est fondamental, notamment grâce à la possibilité de financer publiquement les cultes.

    Notre régime d’assurance sociale (voir : http://blogerslorrainsengages.unblog.fr/2012/01/18/baisse-des-cotisations-de-la-securite-sociale-locale/) et notre régime des cultes avec l’enseignement religieux obligatoire, les prêtres, pasteurs et rabbins payés par l’Etat, le lendemain de Noël et le Vendredi Saint fériés, ainsi que la répression pénale du blasphème sont constitutifs de notre identité.

  24. Un événement inhabituel s’est déroulé l’hiver dernier à Sainte-Ruffine, charmant petit village de l’agglomération messine accroché aux côtes de Moselle. En raison de grand froid et des difficultés à chauffer correctement l’église de la commune, l’abbé du coin a célébré l’office religieux dans la salle du conseil municipal. L’abbé et le maire ont trouvé cette solution avec la bénédiction du droit local. Grâce à ce dernier, ce n’est pas une hérésie de célébrer des cultes dans des bâtiments laïcs. De même, en cas d’impossibilité pour les églises d’assurer les célébrations, là où les presbytères sont désaffectés, les communes sont tenues de mettre à disposition des fidèles un local public. Rappelons que ces dispositions n’ont pas cours en France de l’intérieur.

  25. Souvent ignorée du public, mais largement utilisée par les élus locaux, une loi de 1879 autorise les communes de la Moselle et d’Alsace à imposer aux propriétaires une participation aux frais de construction d’une nouvelle voie. Elle permet d’atténuer, pour les collectivités, le coût d’acquisition des terrains nécessaires à l’implantation de la voie, le pavage, les travaux de réalisation des trottoirs avec des matériaux durables…

    Or, cette disposition, qui offre aux communes une ressource importante, va disparaître en 2015. La suppression de cette faculté est prévue par la loi de finances rectificative pour 2010.

    Cette abrogation soulève deux questions, à savoir si des compensations sont prévues pour le financement des voiries communales nouvelles en Moselle et si, à l’avenir, en vue de la modification d’une disposition de droit local, particularisme auquel les citoyens mosellans sont très attachés, la France entend consulter l’Institut du Droit Local, instance officielle dont la mission est reconnue d’utilité publique.

  26. Le Droit Local conforté

    Le Conseil Constitutionnel français a dernièrement jugé conforme l’article du Code du travail portant sur l’interdiction d’une activité commerciale ouverte au public, le dimanche. Il confirme ainsi le Droit Local.

    Les Sages avaient été saisis, le 31 mai dernier, d’une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) posée par la société Somodia, propriétaire du supermarché G20 de Fénétrange, dans le Pays de Sarrebourg, qui invoquait une atteinte aux principes de liberté d’entreprendre et d’égalité avec le reste du territoire français. L’enseigne contestait l’article (L. 3134-11) du Code du travail portant sur l’interdiction d’une activité industrielle, commerciale ou artisanale les dimanches dans les lieux de vente ouverts au public dans le Haut-Rhin, le Bas-Rhin et la Moselle.

    Le Conseil Constitutionnel a expliqué que les dispositions propres aux trois départements restent en vigueur tant qu’elles n’ont pas été remplacées ou harmonisées avec le droit commun. L’affaire doit désormais être portée devant la Cour de cassation. Si cette dernière suit l’avis des Sages, le supermarché ne pourra pas ouvrir le dimanche en toute légalité. Les verbalisations quasi hebdomadaires des gendarmes devraient par conséquent se poursuivre.

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