Déchets nucléaires
Avec l’installation du Centre Industriel de Stockage Géologique (CIGEO) à Bure, dans la Meuse, la Lorraine a été désignée pour stocker et enfouir les déchets radioactifs de la France entière.
Le Groupe BLE Lorraine ne peut pas tolérer que la Lorraine devienne la poubelle nucléaire de la France. Nous avons donc entamé une action militante pour sensibiliser le grand public, les élus et les décideurs de ce danger qui menace aussi bien la santé des Lorrains (irradiations, cancers, etc.) que les paysages et la biodiversité de notre province, ainsi que sa capacité à exploiter des énergies responsables et durables comme la géothermie, puisque ses sols et ses sources seront contaminés.
Le renouveau et la revitalisation de notre territoire ne peut en aucune manière passer par l’enfouissement de déchets nucléaires, dont la technologie est loin d’être maîtrisée.
Dans cette optique, le Groupe BLE Lorraine soutient la Fédération Grand Est Stop Déchets Nucléaires. Dans le cadre de ce partenariat, vous trouverez ci-dessous une étude accablante sur les déchets nucléaires en Lorraine, généreusement fournie par cet organisme.
Voir également : Paul Huvelin, L’ANDRA, la transparence et la démocratie: déchets nucléaires et hypothèque de la géothermie en Lorraine, mars 2009
ANDRA, Transparence et Démocratie
Lire notre reportage sur le centre de stockage de Bure :
Enquête déchets nucléaires Bure
Consulter nos articles le centre de stockage de Bure :
Avis Autorité Environnementale projet CIGEO Bure
Réserve ASN enfouissement déchets radioactifs Bure
Découverte site archéologique exceptionnel Bure
Annulation déliberation cession Bois Lejuc Mandres-en-Barrois
Condamnation ANDRA mur de la honte Mandres-en-Barrois
Bure reprise Bois Lejuc militants
Enfouissement enteriné parlement francais
Scandale travaux Bois Lejuc ANDRA Bure
Second accident mortel chantier Bure
Coulisses d’un mensonge organisé
Abandon débat parlementaire CIGEO
Conclusions Commission citoyenne
Sécurité déchets nucléaires Bure
Brèches poubelle nucléaire de Bure
Déchets nucléaires ou l’éternité empoisonnée
Primé à de nombreuses reprises, Info Eternity est un film réalisé par Michael Madsen. Il évoque les questions, les enjeux et les problèmes du site d’enfouissement des déchets nucléaires finlandais. Comparable à la poubelle radioactive de Bure, cette nécropole souterraine, creusée à 500 mètres de profondeur, recèlerait une face délibérément cachée.
Il faut dire que le nom donné par les Finlandais à ce cimetière souterrain est sans équivoque : « Onkalo », ce qui signifie la cachette en finnois. Autrement dit, une appellation en forme de message subliminal qui reflète bien l’intention partagée par tous les docteurs Folamour des pays nucléarisés. Plus révélateur encore, la Belgique a donné le nom de « HADES » à son site, ce qui renvoie directement aux Enfers de la mythologie grecque. Au sujet de Bure, la France s’est quant à elle très longtemps retranchée derrière le pseudonyme de « laboratoire », avant que l’ANDRA (Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs), promoteur de la poubelle nucléaire souterraine, ne lance une improbable appellation : « Cigéo ». Un mytho peut en cacher un autre.
Car il s’agit tout de même d’une décharge radioactive démesurée creusée pour y déposer les pires déchets que l’homme n’ait jamais produits. Des poisons dont la radioactivité reste mortelle sur des temps invraisemblables, sur 6 000 générations au bas mot. Néanmoins, il se pourrait bien que la curiosité des générations à venir n’ait pas à s’exercer. L’exemple français est un cas d’école. En effet, l’eau constitue le pire ennemi d’un stockage nucléaire souterrain. En dégradant les fûts, cette dernière se gorge de radioactivité et véhicule le poison au gré des déplacements des nappes phréatiques. Une équipe de scientifiques indépendants a dernièrement tiré la sonnette d’alarme : le sous-sol de Bure est gorgé d’eau et strié d’une multitude d’anciennes failles verticales que les séismes vosgiens tout proches pourraient rouvrir, conduisant très rapidement les eaux dans le stockage souterrain. Ce risque majeur est d’autant plus sérieux que le creusement d’une poubelle transformerait la zone souterraine en un véritable gruyère. Un chiffre longtemps tenu secret parle de lui-même : la longueur des galeries et autres alvéoles avoisinerait les 200 km, tant les masses de déchets nucléaires s’accumulent.
Comment interpréter le fait que dans le pays qui se déclare à la face du monde comme celui des droits de l’homme, l’avis des populations soit aussi superbement ignoré ? Comme si seuls quelques scientifiques et élus, c’est-à-dire une fraction infime de la société, s’étaient arrogés le pouvoir de décider pour tous et pour des millénaires. Fait quasi unique dans l’hexagone, les populations de Lorraine et de Haute-Marne ont elles-mêmes lancé une pétition pour demander un référendum local.
Résultat : 45 000 signatures … balayées d’un coup de main par les autorités !
Bure, c’est quoi ?
Dans les entrailles de Bure, l’ANDRA développe depuis 1998 un projet controversé de tombeau des déchets radioactifs les plus dangereux produits en France par le nucléaire civil et militaire. L’idée est de les stocker sous un polygone de 15 km², à cheval sur quatre communes meusiennes : Mandres-en-Barrois, Bonnet, Ribeaucourt et Bure.
Ce centre de stockage devrait être mis en service en 2025. Il devra confiner pendant des siècles 100 000 mètres cube de déchets nucléaires à Haute et Moyenne Activité radioactive et à Vie Longue (HA/MA-VL) à 500 mètres sous terre. Ces déchets sont composés de produits de fission (césium 134 et 137, strontium 90), mais aussi de résidus liés au fonctionnement des installations nucléaires françaises. Les HA/MA-VL émettront pendant des dizaines de milliers d’années entre 100 000 et 10 milliards de becquerels (Bq) par gramme. Les dépôts seront surveillés pendant 100 ans à compter de la date du premier enfouissement, puis ils seront scellés pour une durée indéfinie. Ces dépôts sont censés rester hermétiques pendant 100 000 ans au moins, après quoi la radioactivité des déchets ne devrait pas être plus élevée que celle émanant de l’environnement naturel.
En collaboration avec 80 autres laboratoires de recherche, l’ANDRA développe à Bure des systèmes de conditionnement et d’entreposage qu’elle veut croire d’une sûreté absolue. Dans un kilomètre de galeries, des milliers de mesures sont effectuées chaque jour par des centaines de capteurs pour évaluer l’imperméabilité de la roche, la vitesse d’infiltration des fluides et les barrières techniques susceptibles de ralentir celle-ci, voire de l’empêcher. Acier, béton et verre sont parallèlement testés pour l’emballage des « colis » de déchets radioactifs. La France devra stocker 50 700 mètres cube de déchets HA/MA-VL en 2025 et 56 100 mètres cube en 2030.
Ces expérimentations ont évidemment un coût : 100 millions d’euros par an réglés selon un principe pollueur-payeur inscrit dans la loi par EDF (80 %), le groupe nucléaire public Areva (15 %) et le Commissariat à l’Energie Atomique (5 %). Mais cela n’est rien au regard des 15 milliards d’euros nécessaires pour le Cigéo. Ce coût pourrait même dépasser les 35 milliards d’euros pour tenir compte de nouvelles normes de sûreté.
Le site de Bure est actuellement composé d’installations en surface (locaux administratifs, ateliers, laboratoires et bâtiment d’accueil du public), sur une superficie d’environ 17 hectares, ainsi que de plus de 1 km d’installations souterraines situées à 445 mètres et à 490 mètres de profondeur, dont il est prévu de doubler la taille. Le site d’enfouissement se situera à 3 km de là.
La résistance s’organise
Sur les 3 115 communes du Grand Est présélectionnées d’office, à peine 42, soit 1,35 % du total, avaient émis un avis positif, afin d’autoriser l’ANDRA à mener des investigations géologiques plus approfondies. L’Agence faisait miroiter à ces communes rurales pauvres la création d’environ 150 emplois et une importante manne financière et économique. Mais les régions et les Etats limitrophes de la Lorraine exprimèrent à plusieurs reprises leur crainte de voir notre province devenir une terre à fort risque nucléaire. Entre la centrale nucléaire de Cattenom et ses 4 réacteurs au Nord, celle de Chooz dans les Ardennes à 150 km à l’Ouest de Longwy et celle de Fessenheim en Alsace à 140 km à l’Est d’Epinal, les possibilités d’échappatoire en cas de scénario catastrophe sont rares. D’autant plus qu’avec le futur Centre d’enfouissement des déchets radioactifs à vie longue dans le Sud de la Meuse, les Lorrains seront complètement cernés. L’étau nucléaire se refermera alors définitivement sur la Lorraine. Et ce ne sont pas les récents accidents nucléaires qui vont nous rassurer. C’est pourquoi les communes qui étaient initialement intéressées par le projet se sont rétractées pour éviter d’être stigmatisées de « village fantôme de l’atome ». Face à ce cuisant échec, l’ANDRA est revenue à la charge et le Centre de stockage radioactif a atterri à Bure, dans un endroit où la contestation générale ne serait pas difficile à mâter.
Pourtant le conseil municipal de la commune de Bonnet, non loin de Bure, s’est prononcé à l’unanimité contre les dessins de l’ANDRA. Cette décision courageuse est exemplaire car cette commune de 217 habitants est située dans la ZIRA (Zone d’Intérêt pour la Reconnaissance Approfondie). Elle perçoit à ce titre des subventions à hauteur de 500 euros par habitant et par an. Le maire de Bonnet, qui soutient la pétition lancée dans le village pour demander l’organisation d’un référendum local, ne désespère pas de parvenir à empêcher le stockage souterrain des déchets radioactifs, même s’il sait que nombre de ses homologues risquent d’être corrompus par l’ANDRA. En effet, malgré le soutien de son conseil municipal, il reste isolé parmi les élus du secteur. Selon lui, « contrairement à ce que nous raconte l’ANDRA, le dossier n’est pas mûr. Mais le débat est clos avant même d’avoir eu lieu : l’enfouissement est devenu la solution unique ». Opposé sur le fond, l’édile dénonce tout autant la méthode des pouvoirs publics qu’il juge suspecte : « Je n’ai jamais vu des entreprises débarquer avec des valises de billets pour faciliter leur implantation. En général, c’est l’inverse qui se produit ». « Acheter ainsi les consciences, c’est trop facile », soupire celui qui fustige aussi les rivalités exacerbées au sein de la communauté des 19 communes du Val d’Ornois, entre celles qui bénéficient des aides financières et les autres.
Enfin, accepter que les déchets de la France entière soient stockés à Bure, c’est accepter la possibilité que Paris fasse du business nucléaire avec d’autres pays pour enfouir leurs déchets en Lorraine.
Le conseil municipal de Mandres-en-Barrois a voté le 18 mai dernier sous haute tension la cession du Bois Lejuc à l’Agence Nationale de gestion des Déchets Radioactifs (ANDRA) pour accueillir le projet d’enfouissement de déchets nucléaires CIGEO. La cession de ce terrain de près de 220 hectares avait déjà été actée en conseil municipal en juillet 2015 de manière rocambolesque avant d’être invalidée par le Tribunal Administratif de Nancy le 28 février 2017 pour vice de forme. Ce dernier avait en effet été saisi par des riverains. La commune avait quatre mois pour régulariser la situation. Une centaine d’antinucléaires avaient fait le déplacement pour empêcher la tenue de ce second vote et dénoncer la « mascarade démocratique » ayant lieu dans ce village de 120 habitants, où des gendarmes mobiles avaient été mobilisés en nombre. Arrivés à la mairie peu avant vingt heures, les onze élus de Mandres ont donc adopté la cession du Bois Lejuc contre un autre bois propriété de l’ANDRA par six voix pour et cinq contre. Quelques jours après le vote, 35 habitants de la commune ont décidé d’attaquer la décision du conseil municipal qui n’a selon eux « aucune légitimité ». Ils dénoncent en effet le fait que « parmi les six élus ayant voté pour l’échange avec l’ANDRA, plusieurs conflits d’intérêts sont avérés. Certains ont des membres de leur famille qui travaillent pour l’ANDRA, tandis que d’autres ont obtenu des terres ou des baux de chasse ». Ces citoyens lorrains veulent également mettre en évidence le « système clientéliste qui écrase les élus et les rend dépendants » . Ils rappellent également la présence massive des gendarmes, plus nombreux que les habitants, le jour du vote, « vécue comme une pression sur la population rurale ».
Après les mises en garde début juillet de l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN) sur le Dossier d’Options de Sûreté (DOS), l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) a elle aussi dernièrement émis plusieurs réserves techniques similaires sur le projet CIGEO d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure porté par l’Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs (ANDRA).
Comme l’IRSN, l’ASN estime que « la recherche de la neutralisation de la réactivité chimique des colis de déchets bitumineux doit être privilégiée ». En effet, ces risques d’incendie exothermiques ont déjà été identifiés depuis longtemps sur ces colis confectionnés entre 1960 et 1990 et représentant 18 % du volume total de déchets amenés à être stockés de manière « réversible » dans le sous-sol meusien.
L’ASN souligne également d’autres failles concernant l’architecture du stockage, le dimensionnement de l’installation face aux agressions, la surveillance de l’installation et la gestion des situations post-accidentelles.
L’ANDRA (Agence Nationale de gestion des Déchets Radioactifs a dernièrement annoncé le report d’un an du dépôt de la Demande d’Autorisation de Création (DAC) du projet CIGEO devant le gouvernement. Repoussée de mi-2018 à mi-2019, cette DAC est censée marquer une étape essentielle dans la construction du futur site d’enfouissement des déchets radioactifs dans le sous-sol meusien à Bure. Cette annonce intervient quelques jours seulement après la publication du rapport de l’IRSN (Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire) qui évoque les risques d’incendie des colis d’enrobés bitumineux dans les alvéoles de stockage.
Dans son rapport d’évaluation du dossier d’options de sûreté du projet CIGEO de Bure, l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN) souligne « quatre points susceptibles d’entraîner des modifications de conception du stockage ». Il redoute notamment « les conséquences d’un incendie dans un alvéole de stockage de colis d’enrobés bitumineux », dans la mesure où « le concept retenu par l’ANDRA (Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs) pour le stockage de ces déchets ne présente pas les garanties de sûreté suffisantes. Le nombre de colis d’enrobés bitumineux concernés est d’un peu plus de 40 000 (soit environ 18 % du total des colis destinés à être stockés dans l’installation CIGEO) et présente un risque d’emballement thermique si leur température augmente, notamment lors d’un incendie ».
L’IRSN conclut qu’il est donc « nécessaire pour l’ANDRA, en relation avec les propriétaires des déchets, d’étudier la possibilité d’un prétraitement destiné à neutraliser la réactivité thermique des enrobés ou, à défaut, de revoir significativement les concepts, afin d’éliminer la possibilité qu’un incendie puisse se propager dans l’alvéole de stockage. A cet égard, les travaux que devrait conduire l’ANDRA sur ces sujets pourraient avoir un impact sur le contour de la demande d’autorisation de construction (prévue en 2018) ou les délais associés ».
La Chambre Civile de la Cour d’Appel de Nancy a dernièrement confirmé l’illégalité du défrichement du Bois Lejuc mené par l’ANDRA près de Bure. La même décision avait déjà été prononcée par le Tribunal de Grande Instance (TGI) de Bar-le-Duc le 1er août 2016. Cette confirmation constitue donc une nouvelle victoire pour les militants antinucléaires, les huit associations engagées dans la procédure, ainsi que les quatre habitants de Mandres-en-Barrois qui ont assigné l’ANDRA en justice. Entre mai et juin 2016, l’agence avait en effet commencé à déboiser une parcelle de sept hectares du Bois Lejuc peuplée de chênes et de hêtres et construit un mur en béton long d’un kilomètre sans autorisation. Six mois avaient été donnés à l’ANDRA pour remettre le site en l’état, déconstruire le mur et replanter des arbres. Rien de significatif n’a jusqu’ici été fait. Le TGI de Bar-le-Duc avait assorti sa décision d’une astreinte de 100 euros par jour et par are à partir de ce délai de six mois. Cela fait donc depuis environ huit millions d’euros. Un arrêté préfectoral devrait néanmoins être pris dans les semaines à venir pour autoriser l’ANDRA à relancer les travaux. Cela dit, tout défrichement est interdit entre le 15 mars et le 31 juillet en raison de la période de nidification.
Bien que le mur soit déclaré illégal par le Tribunal de Grande Instance de Bar-le-Duc, une autorisation préfectorale a été donnée pour continuer les travaux de cette construction honteuse de trois kilomètres de long. La préfecture dit que cet arrêté ne pouvait être livré mais il devrait être affiché. Il ne l’est pourtant nulle part.
Munis de bâtons, de pioches et d’autres outils, près de 500 militants contre l’enfouissement des déchets nucléaires à Bure ont abattu dimanche 14 août une partie du mur en béton construit par l’ANDRA.
Une trentaine d’opposants, qui se relaient depuis le 3 août en vigie à l’orée du Bois Lejuc, ont observé la poursuite de l’activité de l’ANDRA, notamment des travaux de « jointoiement du mur de béton » , ainsi qu’une forte présence policière.
Alors que les travaux ont été déclarés illégaux par le Tribunal de Grande Instance de Bar-le-Duc, la militarisation du territoire et les pressions policières continuent aux abords de la forêt et dans les villages alentours : multiplication des contrôles d’identité, fouilles des véhicules aux abords des forêts de Mandres, contrôles de jeunes du village circulant à vélo, véhicules interdits d’accès à la route menant au Bois Lejuc, agriculteurs sous tension, intimidation verbales des opposants campant à Bure, etc. Comment l’ANDRA et la préfecture peuvent-elles expliquer la présence de dizaines de gendarmes mobiles et de vigiles pour « sécuriser » un chantier qui doit maintenant s’interrompre ?
Non seulement l’agence a commencé des travaux préparatoires à la construction de CIGEO dans le mépris le plus total des règles du Code forestier et du Code de l’urbanisme, mais elle continue de s’enferrer. Elle prétend qu’elle fera les choses proprement d’ici quelques années !
Comment faire confiance à un maître d’ouvrage qui fait fi avec autant de légèreté des règlementations ? On n’ose imaginer ce qui pourrait se passer si l’ANDRA commet des « erreurs d’appréciation » sur CIGEO, projet d’une immense complexité dont elle prétend maîtriser les risques et accélérer la réalisation.
(Source CEDRA : Collectif contre l’Enfouissement des Déchets Radioactifs)
Une quarantaine de militants opposés à l’enfouissement des déchets nucléaires français à Bure a dernièrement construit à l’entrée du Bois Lejuc une vigie sentinelle, afin de surveiller les agissements de l’ANDRA. En effet, depuis la décision du TGI de Bar-le-Duc, l’Agence joue sur une ambiguïté juridique entre le défrichement et les travaux de construction du mur pour continuer son activité sur le site. Les opposants s’interrogent aussi sur la présence d’une centaine de gendarmes mobiles toujours postés sur place pour défendre un chantier illégal. La plateforme a été érigée à quelques mètres de l’orée du bois sur un terrain privé. Les sentinelles et leur vigie ne peuvent donc pas être expulsées.
Après leur victoire historique et la suspension des travaux au Bois Lejuc qui en a découlé, les huit associations et les quatre habitants de Mandres-en-Barrois opposés à l’enfouissement des pires déchets radioactifs français à Bure ont dernièrement déposé deux nouveaux recours, un en référé, l’autre sur le fond, devant la justice administrative contre la décision du maire de Mandres-en-Barrois autorisant a posteriori les travaux d’édification d’un mur, afin de ne laisser aucune possibilité à l’ANDRA de poursuivre ces travaux scandaleux.
Pour qu’une autorisation de construction du mur puisse être délivrée par le maire de Mandres, l’ANDRA aurait dû demander au préalable une autorisation de défrichement au préfet. Celle-ci n’ayant pas respecté la procédure légale, l’arrêté du maire de Mandres ne peut être qu’illégal. Et l’ANDRA risque bien de ne jamais pouvoir obtenir ce fameux sésame d’ici six mois, puisqu’elle va devoir réaliser une étude d’impact, ainsi qu’une enquête publique. Soit une procédure longue et complexe.
Plus que les agissements des gendarmes mobiles, les militants contre l’enfouissement des déchets radioactifs à Bure dénoncent le comportement des vigiles embauchés par l’ANDRA (Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs). Une véritable milice qui fait régner un climat de terreur selon eux. Armés de manière illégale de frondes, de bâtons, de pierres ou encore de grenades lacrymogènes, les vigiles de l’ANDRA n’hésitent pas à se mêler aux gendarmes mobiles, sans que l’on ne puisse vraiment les distinguer, pour effectuer à leur place et sans que ceux-ci ne s’y opposent, le sale travail, à savoir poursuivre, menotter et tabasser les opposants avant de les leur remettre, parfois au-delà de leur terrain. Si bien que plusieurs militants ont porté plainte. L’avocat du mouvement entend par ailleurs saisir le procureur pour demander une enquête. Des photos, des vidéos, des témoignages et des certificats médicaux sont en train d’être rassemblés pour constituer le dossier.
Après un premier passage honteux au Sénat marquée par l’action inique de Gérard Longuet qui vise à précipiter la définition de la réversibilité du stockage et à installer une prétendue « phase-pilote » qui ne serait autre que le démarrage du site d’enfouissement de Bure, la loi sur la réversibilité des déchets nucléaires a dernièrement été transmise à l’Assemblée nationale française. Et c’est le député Christophe Bouillon en personne, nommé président de l’ANDRA (Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs) fin 2015, qui a été désigné rapporteur du texte par la Commission du développement durable ! Incroyable et tout simplement scandaleux. C’est le responsable de l’organisme chargé d’enfouir les pires déchets nucléaires en Meuse sans concertation ni consultation qui est amené à convaincre ses propres collègues ! Si on voulait créer un conflit d’intérêt, on ne s’y serait pas pris autrement. Même le Comité Local d’Information et de Suivi de Bure s’est étouffé à cette annonce. C’est dire !
Pour info : http://blogerslorrainsengages.unblog.fr/2015/02/23/enfouissement-des-dechets-radioactifs-a-bure-la-france-tente-de-passer-en-force/.
Dans la célèbre série télévisée d’animation américaine créée par Matt Groening, Homer Simpson est le personnage principal qui travaille dans une centrale nucléaire délabrée. Depuis la catastrophe de Fukushima, plusieurs chaînes de télévision européennes ont décidé de ne plus diffuser certains épisodes des Simpson dans lesquels Homer tourne en dérision le nucléaire et ses dangers.
Dans le secteur de Bure, la résistance face à l’enfouissement des déchets radioactifs s’organise mollement. La détresse et l’individualisme des paysans font l’affaire de l’industrie nucléaire. L’ANDRA se constitue ainsi depuis plusieurs années une importante réserve foncière aux alentours de Bure. L’idée est de proposer des échanges et d’éviter d’avoir recours à des expropriations au moment où il faudra réaliser le centre de stockage. Cette politique ne passe pas toujours bien. Certains agriculteurs sont contents de pouvoir vendre. D’autres commencent par refuser mais finissent par céder sous la pression. Les agriculteurs sont de plus en plus égoïstes. Quand ils ont vu l’ANDRA arriver, ils se sont dits « par ici la bonne soupe ». Grâce à l’argent du nucléaire, dans tous les villages, les salles des fêtes, les lavoirs, les églises et les gymnases ont été refaits à neuf.
Dissimulé dans la loi Macron, l’amendement de Longuet visant à donner force de loi à l’enfouissement des déchets radioactifs à Bure sous condition de réversibilité n’est finalement pas passé. Le Conseil constitutionnel a en effet jugé que l’Article 201 de la loi Macron était un cavalier législatif, autrement dit qu’il n’avait rien à faire dans cette loi. L’Etat français a tenté de faire passer la loi en douce, afin d’éviter un débat sur la réversibilité de l’enfouissement des déchets nucléaires, car tous les experts savent aujourd’hui que cette réversibilité n’est qu’une vue de l’esprit.
Rappelons que le principe de réversibilité renvoie à la possibilité de récupérer, en tout temps et en toutes circonstances, les fûts nucléaires placés sous terre. Mais les différents incidents et accidents à travers le monde montrent que cela pas possible. A chaque problème, les sites sont hermétiquement clos.
A Bure, l’ANDRA a construit une sorte de laboratoire pour prouver la faisabilité du projet. Le centre d’enfouissement est censé comporter 100 km de galeries à creuser sur 10 à 15 kilomètres carrés de superficie souterraine.
Une enquête publique, pour quoi faire en réalité ? A-t-on expliqué aux citoyens désireux de participer à cette enquête que si le commissaire enquêteur rendait un avis défavorable à la demande de l’ANDRA, eh bien le préfet pouvait passer outre et donner, lui, son feu vert ? Et que si le préfet disait non, celui de région pouvait décider du oui. Et que si le préfet de région optait pour le refus, l’Etat avait le dernier mot. Si, en dictature règne-le « ferme-la », en France la notion de démocratie se trouve pitoyablement résumée à « cause toujours ».
Un permis à points pour les centrales nucléaires françaises ?
Il serait bon d’instaurer un permis à points pour les centrales nucléaires. Le gendarme du nucléaire, l’ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire), n’aurait plus qu’à retirer des points à chaque infraction au Code du nucléaire. Une centrale qui aurait perdu ses 12 points serait ainsi suspendue d’exploitation et devrait repasser son permis. Vu le nombre d’écarts constatés, les 58 réacteurs français seraient bientôt immobilisés pour suspension ou annulation de permis d’exploiter !
La ruralité constitue une cible privilégiée pour l’industrie nucléaire. Toutes les régions désignées pour accueillir les déchets radioactifs ont pour point commun d’être en perte de vitesse, appauvries et dépeuplées. Elles constituent en ce sens des proies faciles. Deux exemples sont particulièrement révélateurs en Lorraine : le projet Cigéo d’enfouissement des déchets de haute activité à vie longue à Bure, en Meuse, et le village d’Avricourt en Moselle. En 2008, une partie de la population de ce dernier s’était opposée, avec succès, à l’accueil d’un centre de stockage des déchets de faible activité à vie longue. Comme si de si petites communes pouvaient porter à elles seules l’avenir de la filière nucléaire.
Pourquoi vouloir réaliser Cigéo si vite alors que les expériences scientifiques faites sont insuffisantes ? Le parallèle avec les précédentes catastrophes de Stocamine en Alsace ou de la mine de sel d’Asse en Allemagne fait froid dans le dos. A chaque fois, les discours en amont étaient les mêmes, pétris de certitudes.
La réversibilité constitue une question centrale du stockage des déchets radioactifs dans le sous-sol de Bure
Pour le grand public, la réversibilité est la possibilité d’aller retirer un colis quel que soit le motif et à tout moment, y compris après la fermeture du stockage. Si c’est bien ce sens qui est donné au mot réversibilité, il apparaît clairement que l’appellation stockage géologique réversible est abusive car le concept est par définition définitif, pour des raisons de sûreté. En effet, le stockage profond des déchets radioactifs est une installation destinée à être fermée définitivement pour limiter les charges supportées par les générations futures. Il fera ensuite l’objet d’un suivi de sûreté passif.
Reste à savoir quand le couvercle sera scellé ? La loi de 2006 table sur une réversibilité d’au moins 100 ans. Soit le temps nécessaire à l’exploitation du centre et à l’enfouissement de tous les colis. Un siècle, c’est une goutte d’eau à l’échelle du temps nucléaire et de déchets qui mettront des millions d’années à devenir inoffensifs.
Ce concept de réversibilité a été élaboré pour faire croire à la faisabilité du centre et faciliter son acceptabilité sociale. Il a notamment permis de faire sauter un verrou psychologique chez nombre d’élus locaux. Or, concrètement, comment récupérer techniquement et financièrement les colis dans un gruyère de 300 km de galeries qui va subir des pressions extraordinaires.
L’ANDRA, qui planche sur une fermeture progressive du centre, voit un intérêt majeur à cette réversibilité. Celle-ci permet de laisser aux générations futures le choix de modifier ou d’orienter le processus de stockage, de retirer les colis stockés et de les entreposer si un autre mode de gestion était envisagé.
Entre 2015 et la date d’autorisation de création d’un centre de stockage, l’Assemblée nationale française doit promulguer une loi fixant les conditions de la réversibilité. Ce calendrier est jugé incohérent, l’ANDRA devant déposer la demande d’autorisation du centre après le débat public. Il serait logique que celle-ci intervienne au contraire après l’adoption de la loi sur la réversibilité, afin d’éviter tout risque de contradiction entre les deux. Par ailleurs, les délais laissés à la recherche par ce calendrier sont beaucoup trop courts.
Géothermie vs déchets nucléaires à Bure
Selon une étude du cabinet suisse Geowatt, spécialisé dans la géothermie, commandée par le CLIS (Comité Local d’Information et de Suivi), le sous-sol de Bure présenterait un potentiel géothermique indéniable qui pourrait compromettre les plans diaboliques de l’ANDRA (Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs), porteur du projet de centre d’enfouissement des pires déchets que l’homme n’ait jamais produits.
Chargée de trouver un site pour son cimetière nucléaire profond, l’agence d’Etat doit respecter les critères édictés par l’ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire), comme par exemple celui d’éviter les « zones pouvant présenter un intérêt exceptionnel en termes de ressources souterraines ». L’ANDRA a au contraire toujours minimisé le potentiel meusien. C’est la raison pour laquelle six associations l’ont assignée fin avril au TGI (Tribunal de Grande Instance) de Nanterre pour « dissimulation délibérée de l’intérêt de la ressource géothermique du site », dans le but de faciliter la réalisation et l’acceptabilité du projet. Selon les experts de Geowatt, il est possible « d’obtenir des débits du même ordre de grandeur que ceux obtenus en région parisienne », soit entre 100 et 400 m3/h. A tel point que les ressources géothermiques des environs de Bure « peuvent être exploitées économiquement ». On est donc loin des 5 m3/h évoqués par l’ANDRA. Pour ses opposants, il s’agirait donc d’un « énième mensonge » de l’agence.
Transparence, démocratie et réversibilité des déchets. Les deux premiers termes sont bafoués à Bure depuis des années. Le troisième est impossible à réaliser. Comment voulez-vous sortir les colis radioactifs une fois que le temps aura fait son œuvre ?
En raison de sa topographie accentuée, la Lorraine, est un territoire à sismicité modérée. Cela signifie que l’activité sismique y est régulière, mais essentiellement constituée de séismes de faible magnitude. Même s’ils sont parfois perçus par la population, ils engendrent rarement des dégâts. Ainsi, dans les Vosges, il y a tous les jours des séismes de magnitude 1 ou 2, des séismes de magnitude 3 plusieurs fois par an et un séisme majeur de magnitude 4,5-5, qui est perçu et fait quelques dégâts, tous les 4-5 ans. Leur épicentre est essentiellement localisé au niveau des Vosges et de la Forêt Noire. On retrouve encore dans cette zone un système de failles tectoniques encore actives qui crépitent assez régulièrement. Le dernier séisme bien connu, proche d’une magnitude 5, est celui de Rambervilliers, survenu en février 2003.